Intervention Conseil National

Le samedi 19 septembre 2015 17:46

« C’est la déception qui crée la dispersion », disent les minoritaires socialistes.

C’est une façon fallacieuse et stérile de poser le problème du rassemblement de la gauche et des écologistes.


-    Quand nous sommes au pouvoir, nos adversaires sont toujours excédés et nos partenaires sont toujours « déçus », parce que nous appliquons notre politique, et non principalement la leur, même si sommes ouverts aux compromis.

 Depuis juin 2012, nous avons fait voter la loi « transition énergétique », nous travaillons d’arrache-pied au succès de la COP21, nous développons les énergies renouvelables, nous avons intégré l’apport de l’écologie politique à notre corps de doctrine, qui est désormais l’éco-socialisme.

Mais Emmanuelle Cosse et la majorité des dirigeants d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) sont amèrement déçus !
Ils ont gouverné avec nous les régions en bonne intelligence, avec beaucoup de succès, et ils rompent aujourd’hui unilatéralement notre alliance, pour faire liste commune, contre nous, avec le Front de gauche, voire avec le parti de Jean-Luc Mélenchon.

Cécile Duflot prépare sa candidature à l’élection présidentielle de 2017. Elle fera le score de Voynet en 2007 (1,57%) ou d’Eva Joly en 2012 (2,31%), et favorisera un remake du 21 avril 2002.

En 2002, précisément, sous le gouvernement de Lionel Jospin, nous avions créé 2 millions d’emplois supplémentaires, favorisé une croissance supérieure à 3% ; institué les 35 heures, les emplois jeunes, la Couverture médicale universelle (CMU) ; Jean-Luc Mélenchon qualifiait le gouvernement de la gauche plurielle de « gouvernement le plus à gauche d’Europe » !
Mais la gauche radicale et les Verts étaient déçus. Nous sommes allés dispersés à l’élection présidentielle, et nos électeurs ont eu, au second tour, à choisir entre Le Pen et Chirac !

Prétendre que c’est « la déception qui crée la dispersion », c’est nous rendre, nous socialistes, responsables de la fragmentation de la gauche. Je dis à nos minoritaires : « Croyez-vous que, si notre gouvernement adoptait intégralement vos propositions sur le redéploiement des 18 milliards restants du CICE, cela ramènerait Cécile Duflot et Jean-Luc Mélenchon à la discipline républicaine ? »

La bonne façon de poser la question des alliances est de répondre à l’interrogation : que voulons-nous ?
-    Diriger ensemble nos municipalités, nos régions, notre pays, l’Europe, sur la base de nos valeurs communes et d’un programme de redressement économique dans la justice ? Ou bien nous résigner à céder le pouvoir à la droite thatchérienne, voire en PACA, et dans le Nord-Pas de Calais-Picardie, à l’extrême droite xénophobe ?

Mélenchon et Duflot nous reprochent d’avoir réduit de 50 milliards d’euros la dépense publique : Sarkozy, Juppé, Fillon, promettent de la réduire du double, d’abolir les 35 heures, de démanteler le Code du travail, de repousser à 65 ans l’âge de départ à la retraite… C’est cela une politique d’austérité ! Nous nous en sommes tenus, quant à nous, au sérieux budgétaire, et avec raison !

-    Avec raison car, avec une dette publique de 2000 milliards d’euros, si les taux d’intérêt sont à 1%, on sait faire. Mais, s’ils passent à nouveau à 5, 6, 7%, alors notre pays va connaître non pas une croissance modérée de 1%, puis de 1,5% en 2016, mais une sévère et profonde récession économique.

Nous n’avons pas pratiqué une politique d’austérité, comparable à celle de nos voisins, la droite française et européenne n’a cessé de nous le reprocher.

Nous n’avons pas supprimé 500 000 postes de fonctionnaires et réduit de 40% les budgets des collectivités locales, comme l’ont fait les conservateurs britanniques ; nous n’avons pas réduit les retraites et les salaires de 20%, comme l’ont fait leurs homologues espagnols et portugais ; nous n’avons pas réduit la durée de l’allocation-chômage de 32 à 12 mois, ni  repoussé l’âge de la retraite à 67 ans, comme l’a fait le gouvernement CDU-Libéraux de Mme Merkel !

- Une double radicalisation -

Sous l’impact de la crise économique, et aussi, de plus en plus, de la crise géopolitique, qui nourrit les flux de réfugiés, d’une ampleur sans précédent depuis 1945, nos pays connaissent une double radicalisation : une radicalisation à gauche et une radicalisation à droite, mais a dominante.
La radicalisation à gauche l’emporte dans les pays qui ont subi une vraie politique d’austérité : la Grèce, l’Espagne, la Grande-Bretagne… En Grèce, « Aube Dorée », parti néo-nazi, fait 7% des voix, alors que Syriza dépasse les 35%, gagnées pour l’essentiel sur le PASOK.
En revanche, la radicalisation à droite l’emporte dans les pays qui ont pratiqué une politique de sérieux budgétaire et de redressement économique dans la justice : la Suède, les pays scandinaves, l’Autriche, la France.
Dans notre pays, le Front de gauche plafonne à 10%, quand le Front national est crédité de 30% aux élections régionales, et de 27% au premier tour de la présidentielle.
L’extrême droite se banalise, la droite sarkozyste s’extrémise, comme dit notre premier secrétaire ; la gauche radicale et les Verts-tendance Mélenchon se marginalisent, ils ne constituent en aucun cas une alternative à la gauche de gouvernement.

La raison principale du sectarisme de nos partenaires, vous ne l’invoquez jamais. Beaucoup d’entre eux sont, en réalité, d’abord dans une stratégie de recomposition de la gauche. Ils sont convaincus que la droite va gagner en 2017, et, perdu pour perdu, ils ont choisi de déblayer le terrain : réduire le PS à l’état du PASOK, ou, au moins, le marginaliser, en finir avec l’hégémonie qu’il exerce sur la gauche française depuis trente ans.
Ceux qui rêvent d’être les Tsipras, Iglesias, Corbyn français se fourvoient.
Le Parti communiste nous l’a assez dit dans les années 1970 : l’union est un combat !
Dans notre politique unitaire, nous devons jouer pleinement sur la contradiction existante entre les appareils du Front de gauche et de EELV et leurs électeurs. Toutes les enquêtes d’opinion l’attestent – les deux dernières ont été commandées par L’Humanité et le site Atlantico – les électeurs de gauche sont pour l’union de toute la gauche contre le Front national et la droite sarkozyste.
Nous proposons le rassemblement à nos partenaires communistes, écologistes, d’extrême gauche. Cet appel s’adresse aux partis, parce que nous ne désespérons pas de convaincre beaucoup d’élus, de militants, de la nécessité de faire face, ensemble, aux défis des temps présents.
Mais nous nous adressons, surtout, aux électeurs de ces partis, qui savent, eux, ce qu’ils ont à perdre d’un retour au pouvoir de la droite thatchérienne ou, pire, d’une victoire de l’extrême droite.

Ce rassemblement n’est pas purement défensif, nous n’agitons pas l’épouvantail Le Pen pour ranger nos partenaires derrière nous, nous ne crions pas « Le fascisme ne passera pas ! ». Nous leur proposons l’unité pour défendre les valeurs de la gauche : l’humanisme, la solidarité, l’internationalisme, qui s’expriment dans notre politique d’accueil des réfugiés. On disait le clivage droite-gauche dépassé ! Force est de constater que, sur cette question, comme sur bien d’autres, ce clivage s’affirme, au contraire, pleinement.
Nous leur proposons l’unité pour redresser la France dans la justice, réindustrialiser notre pays ; moderniser, pour le préserver, notre modèle social ; réorienter l’Europe ; défendre l’environnement et la qualité de vie.
Nous en appelons au peuple de gauche, qui veut l’unité, pour que les électeurs exercent leur pression sur les appareils et les amènent à reconsidérer leur position.