Pourquoi la loyauté de Manuel Valls en fait le leader naturel de la primaire de la gauche. Publié dans le Huffingtonpost
Le lundi 5 décembre 2016 08:46
Le procès en déloyauté intenté à Manuel Valls, à droite comme à gauche, relève de la pure polémique. Comme le disait l'astronome Laplace au sujet de l'existence de Dieu: "cette hypothèse n'est pas nécessaire".
Deux événements majeurs sont survenus cet automne qui ont contraint François Hollande à ne pas se représenter: le premier est la sortie du livre de Gérard Davet et Fabrice Lhomme -"un Président ne devrait pas dire ça..."- qui a donné lieu à une campagne politico-médiatique aux effets dévastateurs. Comment un aussi fin connaisseur du monde des médias que François Hollande a pu accepter de se confier ainsi à deux journalistes d'investigation, sans exiger un contrat imposant une date de parution postérieure à la date des élections, reste un épais mystère. De même qu'est inexplicable le fait qu'il n'ait pas exigé comme condition sine qua non le droit de relecture de ses propos cités entre guillemets.
J'ai soutenu le Président Hollande tout au long de son mandat et encore en septembre dernier dans mon livre "Éloge du compromis" (1), salué par Laurent Joffrin, directeur de Libération, comme "la première analyse sensée du quinquennat de François Hollande". Mais je dois bien reconnaître que la sortie de ce livre neuf mois avant l'élection présidentielle s'apparente à un suicide politique. Le second événement a été la sèche élimination de Nicolas Sarkozy à la primaire de la droite, immédiatement suivie par celle d'Alain Juppé. Il est clairement apparu alors que cette institution donnait le pouvoir aux électeurs d'imposer leur volonté contre le choix des appareils des partis et même de celui de leurs adhérents.
La politique est souvent l'art de choisir entre les inconvénients. Fin novembre 2016, l'éventuel candidat François Hollande n'avait plus le choix qu'entre deux catastrophes: ou bien aller à la primaire de la Belle Alliance Populaire et se faire rejeter par les électeurs de gauche, comme Sarkozy s'était fait remercier par ceux de droite. Ou bien contourner cette primaire, en dépit de son engagement à y prendre part, et provoquer ainsi une crise majeure au sein du PS, au profit des candidatures de Macron, Mélenchon et Montebourg, suivi de l'implosion du Parti Socialiste. Lui était promis alors un score à la Defferre en 1969 (5%) .
C'est ce que Manuel Valls -entre nombreux autres, parmi ses plus proches- lui ont fait valoir, chacun à sa manière. François Hollande a eu la droiture et le courage de sortir de ce dilemme par le haut, en renonçant à se représenter. Dans ce monde d'individualistes à l'ego hypertrophié et de narcisses qu'est devenue la politique, cette décision l'honore et nous oblige: la primaire de la gauche de gouvernement doit être exemplaire dans son fond et dans sa forme comme l'a été celle de la droite et du centre. A cette condition, le candidat qui en sera issu a une chance de battre François Fillon, dont le thatchérisme aggravé va remobiliser les nombreux abstentionnistes socialistes qui prennent peu à peu conscience du péril pour notre modèle social et notre idéal de société que représente le champion de la droite.